En Allemagne, un Turc d’un certain âge demande à une prostituée de venir vivre chez lui moyennant finances pour combler la solitude provoquée par son veuvage. Menacée par des extrémistes dans un bus, elle accepte. La cohabitation ne va pas sans heurts, tandis qu’elle est rongée par l’absence de sa fille, dont elle a perdu la trace depuis des années.
Sa fille, justement, débarque en Allemagne avec 20 euros en poche. Membre d’un mouvement d’opposition en Turquie, elle erre dans une universtité où elle rencontre une étudiante qui lui propose de l’héberger. La mère de l’étudiante apprécie peu de voir arriver chez elle une inconnue aux manières rudes.
Tout dans le film de Fatih Akin n’est que jeux de miroirs : deux histoires qui s’entrecroisent, puis se démultiplient. Après un précédent film coup de poing, Head On, Fatih Akin signe un opus plus maîtrisé, plus apaisé, plus « complet » en quelque sorte où le thème de la transmission – entre une mère et une fille, un fils et un père… – et de l’enrichissement des uns par les autres ne cessent de revenir en leitmotivs pénétrants. Dans ces multiples vases communicants, il est difficile de ne pas voir les rapports entre l’Allemagne et la Turquie, qui s’enrichissent et se détestent, selon les cas. Fatih Akin, cinéaste germano-turc, sublime son histoire par une mise en scène impeccable, une photo admirable et une distribution parfaite. On y reconnaît Hanna Schygulla, ex-égérie du cinéma de la RDA, en mère désorientée par une fille qui lui ressemble et à qui elle ressemble.
Paul Bret
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