Le Metropolitan Museum de New York propose actuellement et jusqu’au 05 août prochain une exposition d’une cinquantaine de robes de Paul Poiret intitulée Paul Poiret, King of fashion. Ce créateur exceptionnel initia une véritable révolution vestimentaire pour le « Tout-Paris » des années 1905-1930. Il est également l’instigateur du concept de la haute couture en tant que prescriptrice pour l’industrie vestimentaire de masse.
La libération du corps féminin
À l’époque où Paul Poiret devient célèbre, la très grande majorité des femmes porte encore d’épais bas opaques, des jupons et des corsets sous de sages tenues le plus souvent en noir ou blanc. L’originalité se limite à quelques touches de dentelle ou de broderie pour se concentrer de façon déséquilibrée sur le chapeau.
Paul Poiret débarrasse la femme de cet accoutrement en jouant sur la simplicité et la fluidité des lignes et le confort mais en ne mégotant pas sur l’ampleur, la couleur et la fantaisie. Poiret rend la femme définitivement visible. Pour la petite histoire, l’innovation de la suppression du corset est disputée à Paul Poiret par Madeleine Vionnet, autre révolutionnaire de la mode féminine et active à la même époque
La mode pour audacieuses et l’invention de la haute-couture commerciale
De l’actrice Réjane vers 1900 à Joséphine Baker en 1925 dans la Revue Nègre en passant par Peggy Guggenheim dans les années 1910, Paul Poiret a habillé les fortes personnalités féminines du début du XXème siècle. On devine que ces femmes exceptionnelles n’ont pas attendu Paul Poiret pour être « libérées ». Elles sont toutes aussi inspiratrices pour le créateur, l’exemple d’Isadora Duncan est flagrant.
D’autres femmes s’empresseront d’imiter ces personnalités originales en s’habillant chez Poiret. Le principe est toujours valable aujourd’hui avec les robes prêtées par les couturiers aux « stars » de l’industrie du spectacle dans l’espoir de retombées commerciales.
Des créations pour privilégiées qui inspireront la rue
Les créations de Paul Poiret s’adressaient à des privilégiées car il fallait une bonne dose de liberté sociale et une bourse bien remplie pour s’autoriser des créations comme ces pantalons « harem », ces robes du soir brodées aux silhouettes novatrices, ces turbans surmontés d’aigrettes dignes du Palais de Topkapi, ces chaussures colorées dont la languette remonte presque sur le mollet, les jupes-culottes et les robes fendues. Ces innovations et originalités se démocratiseront dans les décennies qui suivront.
Métissage des cultures et des avant-gardes
Tout en revisitant la silhouette Directoire, Paul Poiret puise son inspiration dans toutes les influences exotiques de l’époque : la russie pour les blouses, le japon pour les kimonos, l’Inde pour les turbans. Il trouve aussi des idées dans la fréquentation des artistes d’avant-garde du Montparnasse de l’époque. Man Ray était son photographe et il organisait des fêtes somptueuses où se croisaient, entre autres, André Dunoyer de Segonzac, Marie Vassilieff, Kees van Dongen, Tamara de Lempicka ou Max Jacob.
Paul Poiret a également créé les costumes de spectacles comme Plus ça change, en 1922, une féerie délirante de Lucien Vogel ou ceux de L’Inhumaine de Marcel l’Herbier en 1924 avec, entre autres collaborateurs sur ce tournage, Fernand Léger et Robert Mallet-Stevens.
Pierrick Moritz
Catégories :Expositions, Histoire sociale, Musées, New York City
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