La vente d’art contemporain proposée hier soir chez Sotheby’s Londres marque un revirement dans le concours de chiffres d’affaires à date fixe avec sa concurrente Christie’s. Il ne s’agissait pas de proposer n’importe quel “blockbuster” à plus de 10 millions, mais de très bonnes œuvres qui trouvent assurément preneur.
Dans l’absolu, cette stratégie de bon sens permet de limiter les problèmes rencontrés en période de crise économique, c’est-à-dire les invendus, les estimations revues à la baisse et les défauts de paiement.
Le pari est réussi puisque le résultat de la vacation montre des taux d’œuvres vendues de 90.5% en nombre et, surtout, de 94,6% en valeur.
Il serait donc peu pertinent de comparer les 50,7 millions de livres de chiffre d’affaires de Sotheby’s aux 80,5 millions réalisés la veille par Christie’s pour sa vente dans la même spécialité.
Chez la concurrente directe, un Rothko de qualité moyenne, estimé autour de 10 millions de livres, a été retiré du programme et un chef-d’œuvre de Bacon, payé 21 millions avec les frais, a probablement engendré des sueurs froides en étant adjugé 6% au-dessus d’une estimation non révélée par la maison de vente mais donnée à 18 millions sans les frais par plusieurs sources concordantes.
Dans un contexte de grande incertitude économique, l’exigence accrue des acheteurs ne permet plus de proposer des œuvres dont les estimations délirantes sont adossées au prestige institutionnalisé de leur auteur plutôt qu’à leur excellence.
Les choix des acheteurs montrent une installation dans un vrai marché de collectionneurs ou d’investisseurs pertinemment conseillés. Cette clientèle est prête à payer le prix fort pour le meilleur, quitte à pulvériser l’estimation “raisonnable” si une occasion se présente, mais elle ne cherche pas aveuglément à acquérir un grand nom.
L’estimation la plus élevée de la vente de Sotheby’s était de 3/4 millions de livres. Elle concernait deux œuvres, l’une de Gerhard Richter, l’autre de Jean-Michel Basquiat.
L’Abstraktes Bild de Richter, une huile sur toile (200 x 160 cm) de 1992, a été payée 4,85 millions de livres ; l’Orange Sports Figure de Jean-Michel Basquiat, acrylique, oil stick et spray sur toile (152,4 x 121,9 cm), a été échangé contre 4,07 millions.
Le catalogue proposait 6 œuvres de Gerhard Richter. Elles ont toutes trouvé preneur.
Une Abstraktes Bild (Rot), huile sur toile (200 x 140 cm) datée de 1991, estimée 2,5/3,5 millions de livres, a été payée 4,07 millions. Un paysage glaciaire, Eis, une huile sur toile (70 x 100 cm) de 1981 estimée 2/3 millions de livres, a été enlevée contre 4,27 millions. Pour la même estimation, un Kind, une huile sur toile ( 97 x 92 cm) de 1989, a été payé 3,06 million.
881.250 livres ont été engagés sur Grat (1), une huile sur toile (62 x 82,6 cm) de 1989 estimée 700.000/900.000 livres ; 481.250 livres sur un Spiegel, Blutrot daté de 1991, verre de couleur enduit (95 x 86 cm), estimé 350.000/450.000 livres.
De Jean-Michel Basquiat, Tuxedo, une grande encre sérigraphique sur papier (259,7 x 152,4 cm) a pulvérisé son estimation de 250.000/350.000 livres en étant payée 724.750 livres. Il s’agit d’un multiple d’une édition de 10 créée en 1983.
Deux huiles sur toile de Zao Wou-Ki des années 1990 ont également été payées très au-dessus des espérances. Estimées 500.000/700.000 et 600.000/800.000 livres, elles ont été respectivement acquises pour 1,83 et 1,6 millions.
Du côté de l’art contemporain italien, une combustion d’Alberto Burri de 1965 s’est très bien vendue. Estimée 800.000/1,2 million de livres, ce Nero Plastica, plastique brûlé sur toile (101,6 x 76,9 cm) a été payé 2,05 millions. D’Alighiero e Boetti, une Mappa, tapisserie brodée (113 x 168 cm) réalisée en 1983, a été cédée à 735.250 euros avec les frais (12%) sur une estimation de 700.000/900.000 livres sans ces frais.
Un Diamond Dust Shoe d’Andy Warhol, acrylique, encre sérigraphique et poussière de diamant sur toile (228,6 x 177,8 cm), une œuvre de 1980-1 estimée 700.000/1 million de livres et payée 735.250 livres, et un Figure with Monkey de Francis Bacon, une huile sur toile (66 x 56 cm) de 1951 estimée 1,8/2,5 millions de livres et enlevée à 1,83 million, ont également été adjugés sous leur estimation basse.
Un Portrait of a Man de Lucian Freud, huile sur toile (50,8 x 40,6 cm) de 1955, estimée 1,5/2 millions de livres, n’a pas trouvé preneur.
Pierrick Moritz
Article en rapport : https://artwithoutskin.com/2012/02/15/enchere-millionnaire-pour-bacon-et-rothko-retire-de-la-vente-chez-christies-londres
L’estimation n’inclut pas les frais à la charge de l’acheteur. Ils sont de 25 % jusqu’à 25.000 livres ; de 20 % à partir de 25.001 livres et jusqu’à 500.000 livres ; de 12 % au-dessus de 500.000 livres. Le résultat intègre ces frais.
Catégories :Art contemporain, Londres, Marché de l'art
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