Arvin a retenu la leçon que lui avait donnée son père, la fois où il s’était fait tabasser par des enfants de son âge : toujours attendre le bon moment pour se venger. Mais ce que son père ne lui avait pas dit, c’est que la vengeance fait basculer de l’autre côté d’une barrière invisible, celle qui sépare une vie tranquille et sans histoires d’une existence basée sur la fuite perpétuelle.
Car l’Amérique dans laquelle Arvin grandit, l’Ohio des années 50-60, où la ferveur religieuse se dilue dans la dépravation la plus extrême, est peuplée de pasteurs en conversation permanente avec le démon – quand ils ne succombent pas carrément au démon de midi avec de jeunes vierges éperdues de foi.
Donald Ray Pollock décrit cette Amérique de l’après-guerre qui se raccroche à un puritanisme de façade, pour franchir la ligne rouge loin des regards indiscrets, comme ce couple improbable qui sillonne les routes en quête d’autostoppeurs pour des photos pornos – et posthumes.
Le roman de Donald Ray Pollock – dont le héros, Arvin, pourrait être un lointain cousin de Spooner, héros de l’excellent roman éponyme de Pete Dexter, l’ironie en moins, entraîne le lecteur dans une plongée sans limites dans les ténèbres d’une Amérique déboussolée et dévorée par ses propres démons.
Paul Bret
Le Diable, tout le temps de Donald Ray Pollock, Albin-Michel, 22 euros
Catégories :Livres
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