Cet article est une republication en cours d’actualisation.
Les prix des plus belles pièces de l’art ancien africain et océanien ont très fortement progressé au cours de ces dix dernières années, dans le contexte de l’envolée générale des prix pour la rareté sur le marché de l’art. Un des phénomène les plus marquants est le « rattrapage » des prix constatés ces dernières années pour l’art ancien océanien ; mais les plus-hauts enregistrés sur les places fortes (Paris, New-York et occasionnellement Londres) restent situés à des niveaux beaucoup moins élevés que ceux constatés pour l’art ancien africain.
Le prix record pour une œuvre d’art ancien océanien vendu aux enchères est de 3,5 millions de dollars (Paris, 2013) ; le prix record pour une œuvre d’art d’art ancien africain est de 12 millions de dollars (New York, 2014).
Art ancien africain
Les œuvres d’art ancien africain qui atteignent les plus hauts prix sur le marché de l’art sont des pièces anciennes d’usage rituel et provenant exclusivement d’Afrique “subsaharienne”. Elles sont accompagnées de preuves permettant leur traçabilité au plus près de leur collecte (factures, correspondances, photographies, références bibliographiques,…).
Les caractéristiques formelles permettent d’en déterminer la localisation d’origine et même, dans certains cas, le sculpteur. Le critère esthétique est déterminant dans la valeur de ces œuvres d’art.
Il s’agit le plus souvent de masques et de statuettes en bois sculpté. Ils sont rarement antérieurs au XVIIIe siècle en raison des possibilités de durée de vie limitée du matériau en plein air, mais aussi de l’action destructrice de missionnaires évangélisateurs. À partir du XVe siècle, ces derniers se sont empressés de faire disparaître des croyances rattachées au fétichisme et à la sorcellerie, et notamment à grand renfort d’autodafés d’objets cultuels.
Les spécialistes estiment aujourd’hui que les ressources en pièces originales sont quasiment épuisées dans les pays d’origine, un facteur contribuant à l’envolée vertigineuse des prix constatée ces dernières années sur le marché de l’art.
Entre la fin du XIXe et la première moitié du XXe siècle, beaucoup de ces pièces ont été ramenées des anciennes colonies belges et françaises par des personnes de différents milieux sociaux-culturels, de l’ambassadeur au missionnaire évangélisateur (qui ont quand même permis d’en sauver certaines), en passant par le simple soldat, le colon agriculteur ou éleveur, le marchand, le collectionneur ou les membres de missions scientifiques.
Les pièces authentiques et de qualité muséale sont excessivement rares. La majorité du temps, on se trouvera face à des objets réalisés pour les Occidentaux qui vivaient sur place ou, moins heureusement, avec des copies plus ou moins bien inspirées.
Le prix record pour une œuvre d’art ancien africain, établi en novembre 2014 chez Sotheby’s New York, est de 12 millions de dollars (ou 9,6 millions d’euros selon le cours du change de l’époque). il concerne une statue féminine Senoufo, originaire de Côte-d’Ivoire ou du Burkina Faso. Cette pièce célèbre, dite déblé en raison de sa fonction de pilon, d’une hauteur de 92,1 centimètres, datée du XIXe siècle ou du début du XXe siècle, est apparue pour la première fois dans une collection occidentale chez le marchand Emil Storrer, qui aurait pu l’acquérir en 1952). Elle faisait partie de la dispersion de 164 d’œuvres d’art ancien africain et océanien de la collection Myron Kunin.
Art océanien ancien
Les prix de l’art ancien océanien se rapprochent désormais de ceux de l’art africain ancien dans les ventes aux enchères internationales. Les prix d’achat supérieurs au million d’euros sont plus fréquents.
Le prix record pour une pièce d’art océanien ancien vendue aux enchères, établi en juin 2013 chez Christie’s Paris, est de 2,5 millions d’euros (ou 3,5 millions de dollars selon le cours du change de l’époque). Il concerne une figure de faîtage cérémonielle Biwat (Papouasie-Nouvelle-Guinée), d’une hauteur de 106 cm ; selon le catalogue : datée entre 1600 et 1890 (indice de probabilité : 95,4 %), pouvant avoir été collectée entre 1921 et 1933 ; provenant de la collection Jolika du Fine Art Museum de San Francisco.
Du fait la moindre importance de la colonisation française dans l’hémisphère sud, on peut supposer que le nombre de pièces ramenées en France a été plus faible que pour celles originaires d’Afrique.
Elles ont été possiblement moins dispersées sur le marché de l’art car elles n’étaient pas suivis de la même réputation de manne financière.
Toute la documentation, et notamment les photographies d’époque, en rapport avec les arts premiers d’Afrique et d’Océanie est très recherchée.
Une représentation occidentale erronée
Si les pièces d’art ancien africain et océanien les plus recherchées par les Occidentaux sont celles qui n’ont pas subi l’influence stylistique des Européens, la question de la juste représentation de cultures anciennes à travers une sélection d’ordre esthétique opérée depuis plus d’un siècle par eux, d’abord par les missionnaires et les voyageurs, puis par les initiateurs du cubisme et du surréalisme, et enfin par les passionnés de design, se pose rapidement.
Pierrick Moritz
Pierrick Moritz 2011-2018. Ce texte est protégé par dépôt d’empreinte numérique.
Catégories :Afrique, Arts premiers